mercredi 11 mars 2009

Le prestige de frère âne

Un baudet, chargé de reliques, s’imaginait qu’on l’adorait.
Dans ce penser il se carrait, recevant comme sien l’encens et les cantiques.
Quelqu’un vit l’erreur, et lui dit :
« Maître Baudet, ôtez-vous de l’esprit une vanité si folle.
Ce n’est pas vous, ce sont les reliques à qui cet honneur se rend,
Et que la gloire en est due. »
D’un magistrat ignorant c’est la Robe qu’on salue.


Vous reconnaissez tous la fameuse fable de La Fontaine. La morale en est claire et nette; mais j’aimerais attirer votre attention sur un détail qui passe parfois inaperçu car « trop évident ». Ce qu’on reproche à notre « héro » ce n’est pas sa fierté en soi, mais son orgueil et sa vanité.

Son prestige aurait été mieux servit, s’il avait mit sa fierté non pas à sa propre personne, mais plutôt aux reliques qu’il portait et (surtout) à la joie qu’il procurait aux gens par son modeste service de transport. Comme l’a dit quelqu’un : « il est juste de tout prendre au sérieux, sauf soi-même. » Vous aurez compris que le petit supplément d’âme dont il est question ici est d’être fier du service que l’on rend et non de la soudaine popularité qu’il peut nous procurer pour un temps.

Nous occultons trop souvent cette petite vérité qui a pourtant le grand pouvoir de nous donner le sens de l’accomplissement. Le simple « sens du devoir accompli » est rarement dans nos conversations aujourd’hui, mais au combien précieux pour notre bonheur. Pensez-y un instant. De quoi êtes-vous le plus heureux avec le recul? Est-ce de votre « gloriole » ou d’avoir « fait la différence » en vous dépassant par simple bonté d’âme? Si notre frère avait été heureux de prêter son dos que pour la seule satisfaction d’avoir semer de la joie autour de lui en rendant accessible à la vénération populaire les chères reliques, il en aurait récolté que gratitudes et éloges. Ne cherchons donc qu’à rayonner au lieu de s’abaisser à seulement vouloir briller.

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